Défi
personnel, besoin de s'exposer, de se mettre en danger, manque de
moyens ? Francis Azéma, pieds nus, habillé en lui-même, joue
Bérénice en solo. La pourpre drapée, jetée sur les
épaules, en fichu sur la tête, ou portée en châle, fait se
succéder, s'incarner les personnages. De face, de dos, de profil,
depuis la coulisse parfois. Seul, l'acteur est-il vraiment seul ? Les
silhouettes entrent, les fantômes sortent, dans un rai de lumière
ou un fracas de porte. Les ombres passent dans cette forêt sans
feuilles, stérile, derrière ces barreaux de la prison du pouvoir,
de la prison de l'amour. S'assoient parfois sur le banc bancal.
Et
dans une salle captivée où pas une toux, pas un mouvement, ne vient
troubler l'écoute, le vers est roi, le poème est à nu. Tout
simplement beau.
Partition
mathématique, où chaque personnage est différent de l'autre.
Parfois même sans que la pourpre ne bouge sur le corps. Un accent,
un ton, une posture, suffisent. Ainsi Titus est empereur et
Antiochus est roi. À
l'optimisme d'Arsace s'oppose la gravité de Paulin. Phénice, avec
son bon sens et son accent, frise la paysanne de Molière. Mais y
aurait-il une difficulté à changer de corps sans caricature ?
Bérénice apparaît comme une midinette, idiote peut-être. Le
personnage reprend une certaine allure dans la tempête de ses
questionnements, dans la tempête des troncs ou des barreaux, mais
c'est sans noblesse que la reine quittera les lieux.
La
pourpre est abandonnée sur le banc bancal. « Hélas !
»
Qui
dit ce « Hélas ! » ?
Les
six personnages,
laissés là, par l'acteur.
Photos ©
Justine Ducat
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