Habitués
et curieux ont bravé bise automnale, barrières et camions de
déménagement pour assister nombreux à la première ouverture du Théâtre du Capitole dans le cadre des Journées européennes du
patrimoine. Les robes fantomatiques des Willis en ont frémi sur leur
portant.
Il
ne fallait pas faire le petit détour par la salle où l'on accordait
le piano : il ne restait bientôt que quelques décimètres
carrés de parquet de grand foyer pour écouter debout, à côté de
quelque costume impavide, l'histoire du bâtiment.
Faisant
fi du brouhaha des visiteurs, Jean-Jacques Groleau explique avec
gourmandise et anecdotes pourquoi la salle est sise dans les murs de
la mairie, pourquoi elle n'est pas tout à fait rectangulaire,
pourquoi il n'y a pas de lustre (et donc, certainement, pas de
fantôme). C'est passionnant. D'ailleurs le brouhaha s'est presque
tu.
Retour
dans la salle, où il ne reste cette fois que quelques rares sièges
disponibles à l'orchestre. Déjà le balcon de côté se remplit. En
fond de scène, une fenêtre ouverte sur la roche pyrénéenne de
Tiefland.
Christophe
Ghristi, directeur artistique du Théâtre depuis le 1er
septembre, vient lui même sur scène, en toute simplicité,
présenter Kévin Amiel, repéré alors que ce dernier était membre
de l'Atelier lyrique de l'Opéra de Paris. C'est le piano expert et
bienveillant de Robert Gonnella qui accompagne le jeune ténor.
En
hommage à Luciano Pavarotti, Kévin Amiel ouvre son programme par
trois mélodies de Francesco Paolo Tosti. Ce qui surprend d'emblée
est le vibrato serré qui rend la voix immédiatement séduisante. La
diction est exemplaire, le sentiment présent sans ostentation ;
on reçoit au cœur ce Non t'amo più comme une véritable
lettre de rupture.
Suivent
trois « tubes » : Una furtiva lagrima
(Nemorino, L'Elisir d'amore, Donizetti), Che gelida manina
(Rodolfo, La Bohème, Puccini) et È
la solita storia del pastore (Federico, L'Arlesiana,
Cilea) qui ravissent le public. Les aigus sont faciles, le médium
solide, la projection idéale.
Kévin
Amiel revient en interpellant les spectateurs – Ah ! Mes amis, quel jour de fête ! (Tonio, La Fille du
régiment, Donizetti) et semble se jouer des contre-ut. Et, après
un long conciliabule avec Robert Gonnella, c'est enfin le Duc
(Rigoletto, Verdi), que propose le jeune ténor à la grande
joie du public, une donna è mobile chantée avec juste ce
qu'il faut de cabotinage.
Christophe
Ghristi avertit : « une fabuleuse génération de
chanteurs français va déferler sur le Capitole ». Osons
donc regarder la jeunesse – par exemple celle d'un Alfredo l'année prochaine ?
Capitole, 16 septembre 2017
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