mercredi 8 août 2018

Même pas peur : la mort, crânement


Comme Roméo descendant dans la crypte des Capulet, c'est dans les caves de l'Hôtel d'Assézat qu'il faut se rendre pour un rendez-vous avec la mort. Elle est là, assise en linceul sur le bord d'un tombeau, toute petite, mélancolique, accoudée sur son sablier.

Noirs sur fond blanc ou blancs sur fond noir, des crânes vous dévisagent, vous narguent, grimacent ou fument le cigare, roulent des yeux et tirent la langue. La très belle scénographie conçue par Hubert Le Gall souligne détails grotesques et envers (enfers) du décor. Ici point de cartels nécessitant bonnes lunettes et genoux hyperlaxes, point d'épouvantables audio-guides, mais un judicieux Livret de visite, paginé en tibias, et que l'on emporte chez soi : même pas peur de la simplicité belle et efficace !

Hasard de visite : de jeunes dominicains à chapelets sombres s'arrêtent devant les vitrines de chapelets blancs bifaces. Plus loin, on reste saisie par ce transi de femme aux chairs déjà dévorées par les décomposeurs. Netsuke et okimono font siffler les serpents sur les têtes de mort. Les crânes sont partout, en pommeau sur cannes et ombrelles, en montre ou en épingle de cravate – les ados d'aujourd'hui n'ont rien inventé !

Bien sûr le diable est là, tentant chaque Faust avec le feu de l'amour tout en dissimulant fourbement un crâne dans son dos. Et c'est en déambulant parmi les vanités des étages que l'on tombe sur ce crâne en néon rouge dont les dents forment justement le premier mot du Faust de Gounod : « RIEN »...


Fondation Bemberg, jusqu'au 30 septembre 2018

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